Communiqué de l’intersyndicale CGT, FSU, SUD de l’Université Côte d’Azur
Sur invitation de l’UNI, syndicat étudiant se rangeant clairement ici aux côtés de l’extrême-droite de Zemmour, un « débat », avec pour principal invité Stanislas Rigault, leader de Génération Z (branche « jeunes » du parti d’Éric Zemmour) est organisé sur le campus de Droit d’Université Côte d’Azur (UCA).
Par un courrier commun, les fédérations syndicales CGT, SUD et FSU ont demandé l’interdiction de cette rencontre au nom de l’éthique académique et pour la sécurité des étudiant·es étranger·ères. Le président d’UCA, suivant les recommandations du référent « éthique et intégrité scientifique » de notre université, fait le choix regrettable de maintenir cette rencontre en se retranchant derrière une vision très États-Unienne de la liberté d’expression.
En ouvrant ses portes à ce prétendu débat, UCA choisit ainsi d’offrir une tribune à une organisation raciste, sexiste et homophobe, comme son leader, Éric Zemmour, condamné à plusieurs reprises pour injure à caractère raciste et appel à la haine raciale [1] ; qui falsifie l’Histoire du régime de Vichy en minimisant le rôle du Maréchal Pétain dans la déportation et l’assassinat massif des juifs, des tziganes, des homosexuels et des opposants politiques [2] ; qui se scandalise de la réhabilitation du jeune mathématicien Maurice Audin (dont un prix créé par le Société Mathématique de France porte le nom) en déclarant qu’il « méritait 12 balles dans la peau » [3]. Stanislas Rigault ne s’est pour sa part jamais offusqué des dérapages à répétitions de Zemmour et son organisation : croix gammées taguées [4], violences, propos antisémites, racistes, négationnistes, complotistes et sexistes.
Ce meeting, et la présence à craindre d’autres leaders politiques des plus antirépublicains, qui considèrent les universitaires comme des « islamo-gauchistes » et qui ne sont jamais à une fake news près pour manipuler les réseaux sociaux, sont incompatibles avec les valeurs, les missions et le cadre des débats que doit porter l’Université. D’ailleurs, le sociologue Antonio Casilli (Telecom Paris/IHESS) a dénoncé le fait que Reconquête inonde les réseaux sociaux de faux comptes pour créer l’illusion d’un ralliement de la société civile à ses idées [5]. De plus, alors que Reconquête affiche dans son programme la fin de l’accueil des étudiant·es étranger·ères, accueillir cette réunion au sein d’UCA pourrait être perçue comme un affront et une intimidation à l’adresse des étudiant·es étranger·ères qui participent au rayonnement et à la vie de notre Université.
Concernant la liberté d’expression, la législation française est pourtant claire : la liberté d’expression ne couvre pas la diffusion de fausses informations et les discours révisionnistes. Si UCA donne aujourd’hui une tribune et une caution universitaire à ces discours et pratiques, elle n’en sortira pas grandie.
Aujourd’hui, la gouvernance d’UCA refuse d’annuler ce meeting politique. Pour notre part nous dénonçons ce qui est une grave atteinte à l’image de l’Université et à son rôle de défense des valeurs républicaines. Il n’y a pas de débat possible avec l’extrême droite, même quand elle se maquille derrière un vernis respectable, comme le disait Jean-Pierre Vernant, dont l’attachement à l’éthique et à la démocratie ne saurait être mis en doute: « on ne discute pas recette de cuisine avec des anthropophages ».
[1] Jugement du Tribunal judiciaire de Paris, 17e ch., du 17 janvier 2022.
[2] Voir https://www.grasset.fr/livres/la-falsification-de-lhistoire-9782246830818
[3] Propos reportés dans le journal L’Opinion, 18 septembre 2018.
[4] Témoignage d’un ancien militant reporté par France Info, 5 avril 2022.
[5] Voir https://www.telecom-paris.fr/internet-autoroute-desinformation-cnrs-journal